Réaliser l’itinéraire d’accès français au tunnel franco‑italien de la liaison ferroviaire transalpine Lyon‑Turin : proposition de résolution

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat engage notre pays dans l’atteinte de la neutralité carbone en 2050, avec la division des émissions de gaz à effet de serre au moins par six d’ici cette date. Depuis la promulgation de la loi, l’Union européenne s’est également fixé l’objectif contraignant de la neutralité carbone d’ici 2050, avec une étape intermédiaire de réduction d’au moins 55 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2030. Pour répondre à ces objectifs contraignants mais indispensables à la lutte contre le changement climatique, notre pays doit s’engager à faire aboutir les projets les plus structurants permettant de faire baisser drastiquement les émissions des secteurs les plus émetteurs.

Le secteur des transports est, en France, le plus grand émetteur de GES. Il totalise 30 % des émissions. C’est également la principale cause de pollution atmosphérique, devant l’industrie, l’agriculture et le secteur de l’énergie.

Le report modal massif de la route vers le rail est à ce titre crucial, alors que, par exemple, le fret ferroviaire est 20 fois moins polluant que le transport poids‑lourds, et 29 fois moins mortel que la route. Son développement nécessite une action déterminée pour favoriser toutes les complémentarités entre modes de transport, notamment sur les itinéraires les plus fréquentés et ne disposant pas des infrastructures à la hauteur de nos engagements climatiques.

C’est le cas des liaisons transalpines, et du projet de ligne ferroviaire Lyon‑Turin lancé depuis 2001.

Le report modal massif : une nécessité absolue pour lutter efficacement contre les émissions de GES et les pollutions

43 millions de tonnes de marchandises transitent chaque année par les Alpes françaises. Seulement trois millions de tonnes sont transportées en train, le reste étant acheminé par 3 millions de poids‑lourds via le tunnel du Fréjus, celui du Mont Blanc et par l’autoroute à Vintimille, générant 3 millions de tonnes d’équivalent CO2 dans les vallées alpines.

Le projet de liaison transalpine Lyon‑Turin

Depuis les années 1980, le projet d’une nouvelle liaison ferroviaire transalpine entre Lyon et Turin est avancé à la fois pour le trafic voyageurs puis pour le fret. Créés à la suite de la Convention alpine en 1991, le Comité pour la Transalpine (F) et le Comitato Transpadana (I) pour promouvoir la réalisation du Lyon‑Turin s’attachent à promouvoir la réduction des nuisances et des risques en matière de transport intra‑alpin et transalpin et soutient la création d’une nouvelle liaison ferroviaire transalpine. En 1994, un sommet européen retient la transalpine Lyon‑Turin parmi 14 projets prioritaires avec le lancement des études préalables. C’est en 2001, après l’incendie dramatique en 1999 du tunnel du Mont‑Blanc faisant 39 morts et la suspension des liaisons routières pendant 3 ans, qu’est officiellement validé l’accord franco‑italien rendant la réalisation d’une nouvelle ligne ferroviaire officielle pour transporter des marchandises. Ce projet est ensuite intégré au Schéma directeur des liaisons ferroviaires à grande vitesse, et son lancement est entériné par la loi du 2 décembre 2013 autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne pour la réalisation et l’exploitation d’une nouvelle ligne ferroviaire Lyon‑Turin.

Une nouvelle ligne s’impose

La ligne historique Dijon‑Modane qui traverse les villes d’Ambérieu‑en‑Bugey, d’Aix‑les‑Bains, de Chambéry et de Saint‑Jean‑de‑Maurienne se prolonge après Modane en direction de l’Italie par le tunnel du Mont Cenis, un tunnel de crête qui culmine à 1300 mètres d’altitude. Elle est sinueuse avec une partie en fortes pentes qui engendre des surcoûts énergétiques de 40 %.

Suite aux accidents dans les tunnels du Mont Blanc, du Fréjus et sous la Manche, les mesures de sécurité se sont renforcées dans le tunnel du Mont Cenis. Ce tunnel construit en 1871 a été modernisé entre 2006 et 2008 avec une mise au gabarit GB1, mais il n’apporte pas les garanties nécessaires en termes de sécurité : tube unique, absence de galeries d’évacuation, entraxe insuffisant, fortes contraintes d’exploitation pour une circulation mixte voyageurs – marchandises. Des niches de sécurité ont été aménagées, mais elles ne peuvent pas apporter le même niveau de sécurité que l’exigence de galerie d’évacuation imposée par les nouvelles règles.

De plus, les responsables italiens, en charge de la sécurité dans l’ensemble du tunnel, ont renforcé les restrictions de circulation qui imposent depuis de ne faire passer aucune autre circulation lorsqu’un train de voyageurs est entré dans le tunnel, en application du Plan Incident Secours élaboré par les préfets français et italien. Ces restrictions limitent le nombre de circulations à 62 trains maximum par jour. Un renforcement de ces mesures est même envisagé, ce qui limiterait à 48 le nombre de trains pouvant circuler par jour.

En 1997, un peu plus de 10 millions de tonnes ont été transportées par le train sur cette ligne contre 3 millions de tonnes aujourd’hui.

Dans le même temps, le nombre de trains régionaux de voyageurs (TER) a été quasiment doublé par deux. Malgré les travaux d’amélioration des infrastructures de la ligne historique, l’objectif initial de transporter à terme 40 millions de tonnes par le train ne pourra donc jamais être atteint, ce qui justifie le projet d’une nouvelle ligne aux normes actuelles.

Une liaison à dimension européenne

La ligne Lyon‑Turin figure parmi les grands projets ferroviaires prioritaires de l’Union européenne, dans le cadre de la réalisation d’un Réseau TransEuropéen de Transport (RTE‑T). Les corridors de fret ont été mis en place par le règlement 913/2010 qui prévoit la création de 9 corridors de fret en Europe, trois concernent la France : le corridor Atlantique, le corridor Mer du Nord‑Méditerranée et le corridor méditerranéen dont la liaison transalpine Lyon‑Turin constitue le maillon central, manquant à ce jour.

Fruit de multiples traités et accords internationaux depuis la ratification le 7 novembre 1991 de la convention alpine par 8 pays pour assurer la protection et le développement durable des Alpes, la liaison ferroviaire mixte (voyageurs et fret) est bien plus qu’une simple liaison entre deux capitales régionales Lyon et Turin. Il s’agit d’une nouvelle ligne ferroviaire pour le transport des marchandises et des voyageurs, qui permettra de désengorger les routes des Alpes, de la vallée du Rhône et de l’arc méditerranéen et de faciliter les flux de transport de marchandises. Il doit à la fois permettre d’améliorer les liaisons entre les grandes agglomérations alpines de France et d’Italie tout en assurant un fort report modal et une plus grande sécurité des circulations routières. Il contribuera aussi à un rééquilibrage des échanges entre l’Allemagne et l’Italie d’une part, la France et l’Italie d’autre part.

Avec la réalisation des différentes phases et le Contournement Ferroviaire de l’Agglomération Lyonnaise (CFAL), dont seule la partie nord est déclarée d’utilité publique, la France se dotera d’infrastructures essentielles pour lutter contre le réchauffement climatique et protéger les populations des effets de la pollution.

Un double objectif : améliorer les dessertes TER de la Savoie et les mobilités régionales

Au moment où la crise énergétique touche de plein fouet les ménages utilisant leur véhicule pour se rendre au travail notamment, où la réflexion est engagée en France depuis 2019 sur la construction d’un schéma directeur national de RER métropolitains, la libération de sillons fret au profit des TER par la construction de la ligne nouvelle constituera une formidable opportunité afin de proposer aux populations une desserte ferroviaire de proximité intégrant la possibilité d’un cadencement des circulations dans le cadre du RER Chambérien proposé par de nombreux élus. En effet, faire passer plus d’une centaine de trains fret par Chambéry sur la liaison actuelle est inconcevable, car techniquement impossible sans dégrader les dessertes TER, mais également au regard des conséquences pour les riverains.

Développer le fret ferroviaire et le faire passer sur une ligne nouvelle permettra de renforcer et développer l’offre TER sur les lignes actuelles, et de mettre véritablement en œuvre le réseau express métropolitain sur le territoire de Métropole Savoie ou de faire circuler des TER GV (grande vitesse) en direction de Lyon.

Créer une ligne ferroviaire nouvelle permettra également de répondre pour partie aux enjeux climatiques liés au tourisme. 75 % des GES produits par les millions de touristes qui viennent dans les Alpes sont engendrés par leurs déplacements. En libérant les sillons sur les voies actuelles, ceux‑ci pourront être utilisés pour des « TGV neige », et même pour créer de nouveaux arrêts comme celui d’Orelle, en Maurienne, au pied de la télécabine toute neuve.

Cette nouvelle ligne ferroviaire permettra aussi, dès la mise en service du CFAL (Contournement Ferroviaire de l’Agglomération de Lyon), de renforcer la régularité de tous les trains de la région Auvergne‑Rhône‑Alpes. 40 % des retards des trains TER sont dus au fait que tous les trains, quelle que soit leur nature, passent actuellement par la gare de Lyon Part Dieu.

Le chantier est aussi une formidable opportunité économique et sociale pour la vallée de la Maurienne, car au‑delà des milliers d’emplois créés avec une procédure grand chantier mise en place à la demande de la CGT, un contrat territorial Maurienne a été mis en œuvre. Ce contrat, abondé financièrement par l’État, le Conseil Régional Auvergne‑Rhône‑Alpes, le Conseil Départemental de la Savoie et l’Europe, a permis d’investir sur ce territoire plus de 40 millions d’euros à ce jour. Il va se poursuivre jusqu’en 2027 avec le même montant, comme cela a été acté dans le Contrat de Plan État-Région voté par le Conseil Régional Auvergne‑Rhône‑Alpes en octobre 2022.

Des enjeux de santé publique reconnus

Une étude de Santé Publique France a chiffré à plus 650 000 journées d’arrêt de travail et de 42 000 à 45 000 décès chaque année attribuables à une exposition aux particules fines et à l’ozone, deux des principaux polluants atmosphériques. Ce chiffre est estimé à 4 300 pour la région Auvergne‑Rhône‑Alpes, dont 80 sur la vallée de l’Arve et 140 pour les vallées de la Tarentaise et de la Maurienne. Pour les personnes âgées de 30 ans et plus, cela représente une perte d’espérance de vie de près de 8 mois.

À cela, il faut ajouter l’estimation de 2 000 décès dus à une exposition au dioxyde d’azote. Ces seuls chiffres devraient contribuer à une prise de conscience collective et plus particulièrement des pouvoirs publics pour agir vite.

D’autant que le 24 octobre 2019, la Cour de Justice de l’Union Européenne a condamné la France pour la pollution de l’air émise principalement par le trafic routier pour le niveau des émissions de dioxyde d’azote (NO2) depuis 2010 et les particules fines depuis 2005. Par ailleurs, le tribunal administratif de Paris a également condamné l’État le 14 octobre 2021 à réparer le préjudice écologique causé par son inaction climatique pour le dépassement du plafond des émissions de gaz à effet de serre de 62 millions de tonnes d’équivalent CO2 entre 2015 et 2018 fixé par la stratégie nationale bas‑carbone. La politique en faveur de la qualité de l’air et de la préservation de l’environnement nécessite donc des actions urgentes et ambitieuses, et dans ce cadre, la priorité aux transports plus propres comme le train doit en être l’élément central et moteur.

Par ailleurs, entre octobre et novembre 2022, le tunnel du Mont Blanc a été fermé pendant 3 semaines pour d’importants travaux de modernisation et de maintenance. Le programme de ces travaux doit s’étaler sur une dizaine d’années et provoquer des fermetures pouvant aller jusqu’à deux ou trois mois par an.

Cette perspective suscite de très vives inquiétudes parmi la population savoyarde qui subit déjà une circulation de poids‑lourds très importante avec des conséquences évidentes pour la santé des habitants et des nuisances accrues. Cette situation est d’autant plus regrettable que beaucoup de temps a été perdu depuis la DUP (Déclaration d’Utilité Publique) de 2013 concernant la liaison Lyon‑Turin.

La prise en compte des coûts externes de chaque mode de transport

Au‑delà des coûts liés aux décès prématurés et aux pathologies liées à la pollution de l’air, le transport et la mobilité engendrent de nombreux coûts qui sont supportés par la collectivité de manière indirecte mais ne sont pas répercutés équitablement entre les différents modes de transports. Une étude de la commission européenne estime le coût environnemental du transport en Europe à près de 1 000 milliards d’euros, soit 7 % du PIB européen. En France, le coût de la pollution atmosphérique a été évalué entre 70 et 100 milliards d’euros par an par la commission d’enquête du Sénat (rapport remis en 2015). Pour 98 %, ces coûts sont générés par le transport routier.

Sur des trajets transfrontaliers France / Italie à moyenne et longue distance, les coûts induits par 1 million de poids‑lourds et l’équivalent sur le rail représentent 557 millions d’euros pour le transport routier contre 64 millions d’euros pour le transport ferroviaire.

La Suisse : un exemple à suivre

Quelques montagnards suisses visionnaires et résolus ont lancé en 1989 une initiative populaire demandant de protéger les Alpes vis‑à‑vis du trafic de poids‑lourds sur la route. Cette initiative, appelée Initiative des Alpes, a été acceptée par une votation en 1994. Ce fut une journée mémorable pour la démocratie suisse, car le verdict populaire a profondément changé la donne dans le domaine de la politique des transports.

L’Initiative des Alpes et l’article constitutionnel protégeant les Alpes font partie aujourd’hui des bases de la politique suisse de report modal. La Suisse projette une évolution du trafic respectueuse de l’homme, de la nature et du monde alpin – grâce à la politique de transfert, à la construction et au financement assuré de l’ouvrage du siècle que sont les Nouvelles Liaisons Ferroviaires Alpines (NLFA), et à l’extension plébiscitée des transports publics. Peu d’autres domaines de la politique suisse peuvent se targuer d’être aussi progressistes.

Le trafic de transit est un sujet international. En toute logique, l’Initiative des Alpes a dès ses débuts intégré l’aspect international dans ses activités. Les régions alpines en France, Italie, Suisse, Autriche et en Slovénie doivent à tout prix coopérer. La voix des Alpes doit être entendue dans les capitales et à Bruxelles.

Dans le cadre du programme des NLFA, et en moins de 15 ans, la Suisse a mis en service 3 tunnels : le Lôtschberg en 2007 (34,6 km), le Gothard en 2016 (57,1 km) et le Céneri en 2020 (15,4 km) pour un coût de 23 milliards d’euros que l’État helvétique a financé seul. En comparaison, et en intégrant les financements européens, l’investissement de la France pour le tunnel transfrontalier est de 1,96 milliard d’euros (en euros 2022), et de 3,35 milliards d’euros pour l’État et les collectivités locales (estimation en 2022 par SNCF Réseau) pour le scénario « Grand Gabarit » (un tunnel sous Chartreuse, un tunnel sous Belledonne et un tunnel sous le col du Glandon) privilégié par le gouvernement.

Cette volonté politique qui a fortement influencé le projet de la transalpine Lyon‑Turin a fait l’objet d’une mise en œuvre sans failles pour transporter autrement les voyageurs et les marchandises, permettant la circulation par le train de 72 % des marchandises entre la Suisse et l’Italie, contre 7 % seulement entre la France et l’Italie. Elle s’est aussi accompagnée d’un contrôle efficace du mode routier.

L’achèvement de la liaison ferroviaire Lyon‑Turin nécessite un engagement urgent et résolu de l’État

Alors que la date prévisionnelle d’entrée en service de la nouvelle liaison ferroviaire Lyon‑Turin était initialement prévue en 2030, les retards dans la prise de décision du Gouvernement sur l’itinéraire d’accès au tunnel de base entretiennent l’inquiétude. Cette décision est en effet indispensable pour permettre l’achèvement de l’itinéraire et l’ouverture des circulations ferroviaires dans les temps.

Un projet largement partagé

Depuis le lancement du projet, de multiples débats publics ont été organisés. Face à de tels enjeux pour l’avenir, aux conséquences des travaux sur l’environnement et les nuisances pour les populations, avec des investissements importants, il est naturel que les habitants de la vallée de la Maurienne s’inquiètent, se posent des questions et exigent une totale transparence. Mais il est essentiel aussi d’entendre ceux qui sont prêts à supporter les désagréments causés par la nature même des travaux pour que leur vallée ne soit pas sacrifiée sur l’autel d’une politique du « tout routier ». Ces voix sont aussi celles qui alertent depuis plusieurs années pour que les atermoiements cessent et que des décisions soient prises pour transférer le plus vite possible des millions de poids‑lourds sur les trains et rendre l’air plus respirable.

La priorité n’est donc pas de stopper le chantier de percement du tunnel, alors que plus de 25 % des galeries et des descenderies et plus de 11 kilomètres du tunnel de base ont déjà été creusés. Cette décision coûterait beaucoup plus cher que la réalisation totale des infrastructures (tunnel de base, accès ferroviaires et contournement ferroviaire de Lyon) et constituerait un signe désastreux alors que le GIEC exhorte les États à prendre des actes forts et immédiats pour la préservation de la planète et de ses habitants.

Ajoutons qu’une des critiques formulées à l’encontre du projet porte sur son portage : les travaux sont pilotés par TELT (Tunnel Euralpin Lyon Turin) dans le cadre d’un schéma économique de montage du projet public, ce n’est donc pas un Partenariat Public Privé (PPP) comme certains l’affirment. Le cadre juridique et financier de cette infrastructure est précisément déterminé par des accords internationaux, et dans ce cadre, TELT est le promoteur public binational en charge de la réalisation et de l’exploitation de la section transfrontalière de la ligne ferroviaire mixte. C’est une société de droit français détenue à 50 % par l’État français et à 50 % par l’État italien.

Aussi, le 22 octobre 2022, plus de 200 élus, anciens élus, représentants de partis politiques de toutes sensibilités, représentants syndicaux et consulaires savoyards se sont engagés en faveur de la nouvelle ligne ferroviaire transalpine entre Lyon et Turin, au travers d’une tribune qui place ce projet comme essentiel pour l’écologie, l’économie et le développement social.

L’urgence d’une prise de décision du Gouvernement pour l’accès français au tunnel de base

Cet appel très large des acteurs et élus partie prenante du projet porte notamment sur la nécessité de prendre dès aujourd’hui la décision sur le choix de l’itinéraire de la ligne nouvelle entre Lyon et l’entrée du tunnel de base situé à Saint Jean de Maurienne. C’est au Gouvernement français de se positionner sur cet itinéraire d’accès au tunnel de base, comme le rappelle la coordinatrice européenne chargée du projet qui demande à avancer « à grande vitesse » et qui alerte sur le risque « de se retrouver avec un tunnel terminé et des voies toujours en travaux côté français », évoquant même la construction d’un « tunnel vide ».

C’est aussi le message du nouveau ministre des transports italien au ministre des transports de notre pays lors d’un contact récent qui rappelle à son homologue « qu’un effort commun sera nécessaire pour concrétiser le cofinancement européen promis », alors que l’Italie sera au rendez‑vous avec des accès permettant de transporter 25 millions de tonnes par an à l’ouverture du tunnel de base.

Surpris par les tergiversations de la Direction Générale des Infrastructures, des Transports et des Mobilités (DGTIM) sur le projet, le directeur des investissements de transports à la Commission de Bruxelles a enfin rappelé le soutien sans faille de l’Europe à l’achèvement de cette liaison, tout en s’étonnant qu’il n’y ait pas encore eu de demande de subventions de la France sur les voies d’accès pour le Lyon‑Turin. La date limite du nouvel appel à projets lancé par Bruxelles sur les infrastructures de transport est fixée au 18 janvier 2023. Il devient donc très urgent pour la France de se positionner, car l’Europe menace de ne pas accorder les financements attendus, et le risque est de devoir attendre 2027 pour les prochains financements européens.

Aussi, les auteurs de cette proposition de résolution souhaitent que la représentation nationale se positionne pour rappeler à l’État ses engagements et que le Gouvernement prenne une décision très rapide sur les accès français au tunnel de base de la liaison ferroviaire transalpine Lyon‑Turin. Cet engagement est plus que jamais indispensable pour passer des paroles aux actes et construire un nouvel équilibre entre modes de transports en faveur d’une transition écologique réussie et du respect de nos engagements climatiques.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34‑1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement de l’Assemblée nationale,

Vu la Convention alpine signée le 7 novembre 1991 à Salzbourg ;

Vu l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relatif à la création d’une commission intergouvernementale pour la préparation et la réalisation d’une liaison ferroviaire à grande vitesse entre Lyon et Turin, signé à Paris le 15 janvier 1996 ;

Vu la loi n° 2013‑1089 du 2 décembre 2013 autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne pour la réalisation et l’exploitation d’une nouvelle ligne ferroviaire Lyon‑Turin ;

Vu l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne pour la réalisation d’une nouvelle ligne ferroviaire Lyon‑Turin, signé à Turin le 29 janvier 2001 ;

Considérant l’ensemble des traités et accords internationaux pris par la France depuis la ratification le 7 novembre 1991 de la convention alpine par huit pays pour assurer la protection et le développement durable des Alpes ;

Considérant les engagements pris par la France à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40 % d’ici à 2030 dans le cadre de l’Accord de Paris ;

Considérant les objectifs de division par au moins six des émissions de gaz à effet de serre et d’atteinte de la neutralité carbone en 2050 fixés par la loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat ;

Considérant les objectifs contraignants fixés par l’Union européenne dans le cadre de l’ « ajustement à l’objectif 55 » visant à réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici à 2030 et à atteindre de la neutralité carbone d’ici 2050 ;

Considérant les engagements de financement par l’Union Européenne du projet comme élément du projet prioritaire n° 6 du réseau transeuropéen de transport ;

Considérant l’aggravation de la pollution dans la vallée de la Maurienne dont le transport routier de marchandises est responsable en grande partie ;

Considérant le caractère d’urgence exprimé dans la déclaration d’utilité publique du 23 août 2013 sur les voies d’accès au tunnel de base ;

Invite le Gouvernement à prendre une décision rapide pour l’itinéraire d’accès français au tunnel franco‑italien de la liaison ferroviaire transalpine Lyon‑Turin ;

Invite le Gouvernement à formuler ses demandes de subventions au titre de la réalisation des voies d’accès au tunnel Lyon‑Turin en répondant à l’appel à projets de l’Union Européenne sur les infrastructures de transport dont la date butoir est fixée au 18 janvier 2023.

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